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Suite à la sécheresse : quoi faire maintenant sur ses prairies ?

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Conséquence probable du contexte de dérèglement et réchauffement climatique, la sécheresse de l’an dernier, inédite dans son prolongement hivernal actuel, ampute toujours fortement le potentiel de nombreuses prairies : perte de bonnes espèces, salissement, voire absence de végétation, sont visibles encore fréquemment.

Du coup, quelles options sont envisageables pour tenter, malgré tout, de disposer d’herbe pour la saison qui démarre (et redonner de l’air en terme de gestion des stocks) ?

Petit tour des possibles, avec les conseils de techniciens BARENBRUG et CERIENCE, suite aux tournées prairies proposées mi-février par la Chambre d’Agriculture….

DU FOURRAGE MALGRE TOUT ? QUELLES OPTIONS MAINTENANT ?
La 1ère des choses est de faire le point sur son état : quelle végétation, quelle couverture ?
Soit la prairie est relativement « propre » et dense, avec une majorité d’espèces prairiales intéressantes ; soit le salissement est important (moins du 30 % du couvert tout de même), toujours avec de bonnes espèces en quantité ; soit est constatée une dégradation importante de la végétation.

Si le couvert est très dégradé, avec peu de bonnes espèces à « sauver », le retournement s’impose.
En l’absence de labour, le désherbage mécanique est à préférer dorénavant, avec au minimum 2 passages agressifs, la difficulté du désherbage chimique étant celle du nécessaire délai de 1,5 mois avant resemis.
Dans ce cas de réfection totale, le resemis de la prairie est idéalement à faire précéder d’une autre culture, surtout si le labour n’est pas possible. Si ce resemis prairial est tout de même souhaité ce printemps, une association à une céréale / un méteil semé(e) le même jour est alors conseillée, utile pour limiter le salissement ultérieur (et fournir rapidement de la végétation : cf. plus loin).

Un salissement plus léger ou/et le maintien en bonnes proportions d’espèces prairiales fourragères peut limiter l’intervention à un sursemis de regarnissage.

COMMENT ?
Que les opérations soient de rénovation ou de regarnissage, chaleur et humidité seront nécessaires aux bonnes germination et levée des espèces nouvellement semées. Autre point de vigilance, la profondeur de semis : les graines de fourragères n’ayant que peu de réserves, la levée doit être rapide ; le contact sol / graine doit être assuré et le semis peu profond.

La préparation doit donc être la plus fine et soignée possible, quitte, après travail du sol pour une rénovation, à rouler avant et après le passage du semoir. Un sursemis ne nécessitera qu’un rappui, pouvant être assuré par le bétail.
Enfin, ce qui peut aider aussi au bon démarrage de ces espèces nouvellement introduites est une disponibilité en éléments minéraux assimilables, en particulier le calcium (Ca) et le phosphore (P).

A noter que la 1ère utilisation d’une prairie nouvellement semée est idéalement de la fauche, sans intervention pendant quelque 8 mois après semis pour laisser le temps à l’implantation de bien se faire.

QUOI ?
Pour un regarnissage, les espèces « sursemables » dans un couvert en place doivent être agressives à l’implantation ; cela limite le choix à des ray-grass et trèfles, voire à un peu de chicorée pour des pâtures à proximité immédiate des bâtiments. Le semis est à effectuer impérativement dans un couvert ras, avec des zones de sols nus et avec rappui ensuite.
Pour cette fin d’hiver, dans l’optique d’avoir de l’herbe dans les 90j après le semis, un RGI diploïde non alternatif, mis épais (à 30 kgs/ Ha) est ainsi une option (voire en semis, d’ailleurs ; ensuite, pourra être implanté un sorgho multi-coupes -pour de la pâture ou du stock-, avant réimplantation en prairie, ou pourquoi pas en méteil dérobé hivernal).
Un RGI alternatif est possible aussi, et demandera plutôt 80j de végétation ; il sera cependant moins facile à gérer en termes de montée à épiaison, surtout si le temps sec devait durer.
Autre option, pourquoi pas : sursemer une céréale de printemps dans la prairie à regarnir, pour profiter du fait que les céréales ont une croissance -y compris racinaire- plus rapide que les graminées prairiales. Peuvent être encore utilisées de l’orge ou de l’avoine de printemps (c’est un peu tard maintenant pour une avoine rude), associées éventuellement à un trèfle d’Alexandrie ou à de la vesce (de printemps) …
La céréale (OP ou AP) pourra être semée à dose réduite par rapport à un semis classique, soit à 40 kgs / Ha ; le TA pourra être mis à 10 – 12 kgs /Ha, la vesce à une vingtaine de kgs/ Ha.

Pour une rénovation, les espèces prairiales telles que dactyle et fétuque élevée profiteront de la préparation du sol pour avoir le temps de s’installer ; mais ces espèces, idéales dans un objectif de pérennité d’une prairie, donneront de la végétation dans un temps plus long que ces 3 mois.
Du coup, semer la prairie sous couvert d’une céréale de printemps peut s’avérer intéressant : toujours avec une orge ou de l’avoine de printemps, toujours associées éventuellement à de la vesce (de printemps) ou à un trèfle d’Alexandrie, aux mêmes doses que précédemment. La prairie quant à elle sera semée à dose normale.
Le semis sera alors à faire en 2 passages : la céréale (avec ou sans vesce) dans un 1er temps, puis le semis prairial, plus superficiellement (avec les 2 roulages).

Une luzerne peut aussi être semée sous un couvert d’AP ou d’OP, avec ce même procédé : 2 passages, la céréale à dose réduite puis la luzerne à dose normale (20 - 22 kgs / Ha). Le moment est idéal pour les semis de légumineuses, plantes de lumière et de jours longs.

MORALITÉS

  • mettre à profit cette période douce et (relativement) pluvieuse pour opérer (sursemis ou resemis), en dosant un peu fort la semence et en n’hésitant pas à booster ce semis par un apport de PK sous forme soluble (ou engrais starter type locamaïs)
  • tenter, pourquoi pas, sur 1 ou 2 parcelles, de jouer sur la complémentarité avec des céréales de printemps (associées avec une vesce ou du trèfle d’Alexandrie), en semis sous couvert voire semis dans le couvert ?
  • fertiliser les prairies où aucune intervention mécanique n’est envisagée, avec de l’azote, facilement assimilable là aussi (donc sous forme d’engrais minéral ou de lisier), pour stimuler la pousse des graminées
  • anticiper un éventuel semis de dérobée estivale (sorgho multi-coupes, teff, millet, moha), « mettable » en place à partir de fin mai
  • et toujours : faire pâturer sans râper !!! Etre d’autant plus vigilant à laisser un talon résiduel de 5 cm de végétation (ne surtout pas attaquer le plateau de tallage : l’herbe doit être encore verte à la sortie des bêtes), que le contexte reste séchant.

Semis ou sursemis, il reste encore quelques jours pour opérer, en profitant du redoux et des quelques pluies … sans tarder toutefois.
Il importe aussi de garder toujours en tête que les principaux facteurs de dégradation -et donc d’amélioration- d’une prairie sont ses pratiques (modes d’exploitation, de fertilisation, …), et que les mêmes causes produisent les mêmes effets, particulièrement mis en évidence lorsque les conditions deviennent limitantes.
 

Contact : Marie Claude MAREAUX - CHAMBRE D'AGRICULTURE 64 - 05 59 80 69 92 - mc.mareaux@pa.chambagri.fr