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Gérer l’infestation du datura en grandes cultures bio

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La rotation des cultures et le broyage des jeunes pousses restent les méthodes les plus efficaces pour détruire cette adventice très toxique tant pour les humains que pour les animaux.

Le datura stramoine est une adventice annuelle invasive, qui se répand en Nouvelle-Aquitaine, du sud vers le nord. Originaire d’Amérique du Nord, elle est observée dans les cultures d’été : maïs, soja, tournesol et sarrasin, dans les intercultures qui suivent les céréales à paille et le colza, dans de jeunes prairies et dans les cultures légumières. Cette adventice est très nuisible en culture (fort développement), mais affecte aussi la qualité de la récolte. Le datura est une plante toxique en raison des alcaloïdes tropaniques (atropine et scopolamine) qu’elle contient. Ces alcaloïdes sont présents dans l’ensemble de la plante (fleurs, feuilles, graines et sève). Ils agissent sur le système nerveux et entraînent des troubles cardiaques et des hallucinations.

La toxicité du datura
Une nouvelle réglementation européenne entrera en vigueur au 1er septembre prochain en ce qui concerne les teneurs maximales en alcaloïdes tropaniques dans les plantes récoltées et destinées à l’alimentation humaine. Les teneurs réglementaires maximales seront fixées entre 5 et 15 µg/kg de grains selon les espèces récoltées. Ce règlement s’applique à la commercialisation en vue d’une première transformation. Pour l’alimentation animale, la limite réglementaire concerne la quantité de graines de datura : elle est fixée à 1 g/kg dans toutes les matières premières ou aliments pour animaux (Directive Européenne 2002/32).
Ces seuils sont très faibles et sont généralement atteints avec la production d’une seule plante. En effet, une étude d’Arvalis, conduite depuis 2017, a établi qu’un gramme de graine de datura contient en moyenne 4 443 µg d’alcaloïdes.
La dose toxique chez les bovins est de 600 à 900 mg de graines par kilo de poids vif. Un pied de datura pour 25 m2 peut suffire à provoquer une intoxication mortelle chez les bovins via le maïs fourrage. Il est à noter que la taille des graines (2,5 à 3,5 mm) complique leur élimination par nettoyage mécanique de la récolte de tournesol ou de sarrasin.

Quelques éléments de biologie
La période de levée du datura est très étalée : de fin mars à fin août. Dès qu’on remue le sol, même avec très peu de lumière, il y a des levées. Une graine est en capacité de germer même en étant à 15 cm de profondeur. La durée de vie de la plupart des graines est très longue (jusqu’à 60 ans pour des graines enfouies !).
Sa forte nuisibilité est le résultat de la combinaison de 3 facteurs : son développement luxuriant ; donc forte concurrence des cultures d’été, ses graines toxiques (alcaloïdes) et sa forte durée de vie des graines.

Les principaux leviers de gestion
Une stratégie globale de gestion de cette plante toxique est donc indispensable ! Premièrement, il ne faut surtout pas laisser monter à graine les daturas pendant l’interculture/sur les passages d’enrouleurs/les bords de parcelles. Attention, les graines de datura mûrissent très vite : il ne faut donc pas attendre et broyer la plante au plus tard lorsque les bogues commencent leur formation.
Sur les parcelles avec datura, il est conseillé d’allonger la rotation, de limiter les cultures d’été, de les écimer et de les faucher. En cas de première infestation, tant que la densité est “gérable”, il ne faut surtout pas labourer, mais laisser les graines en surface pour pouvoir les déstocker. Pour cela, il est conseillé de réaliser des faux semis pour favoriser les levées du datura. Ensuite, des passages de herse étrille et de houe rotative sont efficaces jusqu’aux stades 2 à 3 feuilles, mais ces outils seuls ne suffisent pas car les levées sont très échelonnées. On notera une efficacité intéressante de la bineuse à condition de faire plusieurs passages.
En cours de saison, il faut arracher les daturas manuellement en prenant soin de sortir les plantes de la parcelle (forte capacité de repiquage) en portant des gants, ne pas brûler les plantes (fumée toxique). Concernant l’écimage, il est à réaliser avant la maturation des bogues (la semence évolue très rapidement à l’intérieur).
À la récolte, si possible commencer par les parcelles les moins infestées pour ne pas répandre d’éventuelles graines dans le reste des parcelles. Veiller au bon nettoyage du matériel de récolte entre les chantiers. Surveiller particulièrement le début de chantier de la machine, là où des graines de datura peuvent tomber au sol. L’été, un travail superficiel puis de plus en plus profond fera remonter les adventices et les fera germer avant l’automne. La rotation des cultures et le broyage des jeunes pousses de datura restent les méthodes les plus efficaces pour limiter leur développement. Le tout sera complété par le labour, les déchaumages et les faux semis qui ont une efficacité plus aléatoire. Le décalage dans la date de semis est, quant à lui, non pertinent puisque le datura pousse toute la saison.

Contact : Ludivine Mignot, conseillère bio chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques