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La finition des jeunes bovins mâles en bio

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Tour d’horizon d’un itinéraire de production innovant sur Limousin conduit dans la station expérimentale de Bordes (Indre).

Pour acquérir des références sur de nouveaux modes de production permettant de valoriser des jeunes mâles conduits en agriculture biologique, des itinéraires de production innovants ont été testés dans les trois stations expérimentales bovines Bio de France. Faisons un focus sur ces tests d’itinéraires (Limousin de 11 mois conduits en 2022-2023 à la ferme expérimentale des Bordes dans l’Indre) qui ont été présentés cette fin d’année 2023. L’objectif de l’essai était de produire de très jeunes bovins mâles (moins de 12 mois) en Limousin pur avec un objectif de gain moyen quotidien de 1 200 g/j. Les vêlages s’étaient déroulés entre le 25 janvier et le 15 février, les mâles n’ont pas été castrés. Ils ont été mis à l’herbe le 20 avril 2023 dès que la portance du sol l’a permis. Le sevrage a eu lieu fin septembre à 8 mois et ils ont été engraissés du sevrage à l’âge d’un an. Ils ont été battus le 11 janvier.

Importance de l’alimentation
Au niveau alimentaire, les vaches en bâtiment avaient du foin à volonté et 300 g de méteil grain. Les veaux n’avaient accès à aucun aliment en bâtiments. Les vaches à l’extérieur à partir du 20 avril ont pacagé en mode pâturage tournant avec un passage sur les regains le plus tôt possible. Elles ont eu une complémentation en foins à partir du 25 août 2022 à cause de la sécheresse.
Les veaux n’ont pas eu de fourrages, ils ont été complémentés en méteil grain (1,25 kg/j/animal) à partir du 14 septembre 2023. En période d’engraissement, ils ont eu de l’enrubannage à volonté et 2,6 kg de méteil grain composé à 83 % de céréales, 9 % de féverole et 8 % de pois. Un enrubannage de premier cycle récolté plutôt précocement (le 12 mai), à 165 g/kg MS de MAT, permet d’avoir une très bonne teneur en énergie et protéine. Il a été nécessaire de tamponner la ration avec du foin à volonté pour ralentir la transition des animaux.
En phase d’élevage, les couples vaches/ veaux avaient 93 ares de pâture, 850 kg MS d’enrubanné, 978 kg MS de foin et 39 kg de méteil (à 167 g/kg MS MAT). En phase de finition, les veaux ingéraient en moyenne journalière 4,6 kg MS/j d’enrubannage, 0,2 kg MS/j de foin, 2,3 kg MS/j méteil, soit 516 kg d’enrubannage, 17 kg de foin et 275 kg de méteil. Les surfaces dédiées par couple mère/veau pour le bilan alimentaire total (phase élevage + phase finition) sont de 45 ares d’enrubannage, 0,25 are de foin, 0,9 are de pâture et 0,08 are de méteil.
À noter que les apports de méteil pour les vaches en hiver ont été très faibles cette année du fait de fourrages de qualités. En revanche, en 2022, en année moins propice, la surface de pâturage a dû être augmentée pour le couple mère/veau. Durant la phase d’engraissement du veau, l’apport de méteil dans la ration moyenne était de 32 % (40 % maximum autorisés dans le cahier des charges AB).
Grâce à une bonne pousse de l’herbe au printemps, les croissances sur cette période ont été très bonnes sans complémentation (1 400 g/j). Avec l’installation de la sécheresse au mois de juin, des décisions stratégiques ont dû être prises pour le pâturage. Les vaches suitées ont ainsi eu de l’herbe jusqu’au 25 août. La petite complémentation de 1,25 kg de méteil du 13 au 27 septembre au pré a complété la ration.
Après sevrage, les veaux sont passés à une ration à base d’enrubannage et de méteil grain avec une transition alimentaire sur 1 mois. Durant la période d’engraissement, les croissances ont été assez stables à 1 115 g/j. Le GMQ moyen naissance-abattage sur ces animaux a donc été de 1 103 g/j contre les 1 200 g/j objectif.

Engraissement des animaux
Les animaux ont été abattus à 343 jours et en moyenne à 421 kg de pois vif avant abattage. Du fait de la croissance limitée durant la période d’engraissement et d’une date d’abattage plus précoce que l’année précédente, les carcasses sont légères (245 kg carcasse froide) avec une conformation cor- recte R + mais un manque d’engraissement (en moyenne 2,1). Le rendement commercial était de 58,1 %. La viande était rouge clair (4 sur une échelle de 1 à 6) avec des gras jaune pâle (1,6 sur une échelle de 1 à 4), très peu persillé (1,75 sur une échelle de 1 à 6) et un marbré quasiment absent (0,75 sur une échelle de 1 à 5).
En conclusion, la conduite naissance sevrage sans concentré a été la combinaison d’une bonne production laitière des mères et d’un pâturage de qualité avec une gestion en pâturage tournant. La sécheresse estivale précoce a obligé à faire des choix sur le pâturage des animaux. Pour favoriser les vaches suitées, le pâturage des génisses a été interrompu dès la fin du mois de juin pour libérer des surfaces pour les vaches.
La conduite pendant la période d’engraissement était à base d’enrubanné de prairie multi-espèces de bonne qualité et de méteil grain. Cette ration a entraîné un léger déficit en énergie par rapport aux besoins, les performances ont été légèrement en deçà des objectifs visés de 1 200 g/j. Les poids carcasses du fait des performances et de l’âge d’abattage sont donc faibles. La viande est relativement rouge avec un état d’engraissement satisfaisant, mais elle n’a que peu de persillé. Ce manque de gras peut s’expliquer par la génétique plutôt tardive des animaux et par l’âge d’abattage, comme l’indique Antoine Buteau de la ferme expérimentale des Bordes.
L’engraissement est bien multifactoriel, même si basé sur l’alimentation, notamment en conduite bio qui limite les durées d’engraissement en bâtiment et augmente l’impact des aléas climatiques et donc la nécessaire adaptation de la conduite des parcelles et des rations.
La technicité reste un élément clé de la finition des animaux en bio. La valeur alimentaire de chaque aliment doit être connue (surtout pour des aliments aléatoires en termes de valeur tels les méteils ou les prairies multi-espèces) pour atteindre un équilibre de ration permettant d’atteindre des objectifs réalistes. 

Contact : Ludivine Mignot,  conseillère bio Chambre d’agriculture 64, l.mignot@pa.chambagri.fr