Vous êtes ici : Accueil > Actualités > Les marchés du bio à l’épreuve de l’inflation

Les marchés du bio à l’épreuve de l’inflation

Accéder aux flux rss de notre siteImprimer la page

Le dernier observatoire des chiffres bio montre une filière en recul même si tous les marchés ne sont pas affectés.

L’Agence bio édite un panorama des chiffres bio 2 fois par an. Elle s’appuie sur une cinquantaine de sources, en partenariats avec les dix organismes certificateurs agréés en France, qui lui permettent un recensement relativement exhaustif des exploitations, transformateurs et distributeurs de l’agriculture biologique. Viennent également en appui pour cautionner ses chiffres les chambres d’agriculture, la FNAB, les associations InterBio Régionales, les Draaf et les interprofessions nationales de filières. Elle travaille également en étroite collaboration avec le cabinet d’études AND International qui réalise une évaluation du marché alimentaire bio dans ses six circuits de distribution en enquêtant l’ensemble des opérateurs et en s’appuyant sur les données et les analyses d’autres organismes tels que Nielsen IQ, l’agence Good, l’ObSoCO, Kanter WorldPanel…

L’impact de l’inflation
Sans surprise, en 2022, l’inflation met à mal le pouvoir d’achat des Français. On pourra noter que les produits alimentaires biologiques sont également touchés par cette inflation mais dans une moindre mesure (+ 4 %, source ANDI). Sur les produits de grande consommation à poids fixe, cette inflation est nettement plus marquée en grande distribution (+ 6,7 %, source Nielsen IQ) qu’en magasins spécialisés (+ 2,8 %, source Good, Bioanalytics).
L’inflation a, entre autres, entraîné un recul inédit de la consommation alimentaire des ménages français de - 5,1 % (hors inflation) en 2022. Comme pour la grande majorité des labels de qualité et environnementaux, le bio a connu une importante baisse d’intérêt pour les consommateurs. Les Français portent moins d’attention aux logos. Ils sont notamment 65 % à se dire attentifs au logo AB au moment de choisir un produit alimentaire, soit une baisse de 11 points par rapport à 2021, pour revenir au niveau d’attention observé en 2015, et 73 % des pertes du bio en valeur vont vers d’autres offres labellisées.
Deux débouchés sont scrutés pour les produits bio : la restauration hors domicile qui représente 8 % de la consommation, et la consommation à domicile (92 %) qui se réa-lisent à travers quatre circuits de distribution. Ainsi, 128 000 points de vente de produits bio sont recensés. 18 000 sont des magasins de grande distribution, 3 086 des magasins bio spécialisés (baisse de 3,2 % par rapport à 2021), 26 300 fermes bio qui vendent en direct (+ 3 % par rapport à 2021) soit plus de 40 % des fermes bio françaises et 80 000 artisans et petits commerçants dont entre autres, 33 000 boulangers ; 17 000 bouchers, 16 000 primeurs et 10 000 cavistes.
Tous les circuits de distribution voient un recul de leur vente de produits bio de - 2,6 à - 8,6 % de chiffre d’affaires, sauf la vente directe, que ce soit à la ferme ou sur les marchés qui voit son chiffre d’affaires progresser de 3,9 %. Les achats des ménages de produits alimentaires biologiques pour leur consommation à domicile baissent de 4,6 %, soit près de 600 millions d’euros de perte. La part des produits bio dans le panier est en baisse avec 6 % en valeur en 2022 (contre 6,4 % en 2021).
La baisse dans les magasins spécialisés s’élève à 8,6 %. Elle a été accélérée par les fermetures de magasins et les disparitions d’enseignes. En grande distribution généraliste, la baisse de 4,6 % est essentiellement due à la réduction du nombre de références bio. À noter, que les enseignes discount réalisent une croissance de l’ordre de 11 % liée à l’augmentation de leur fréquentation et l’accroissement de leur gamme biologique.
Les artisans subissent une moindre baisse de leur vente (- 2,6 %) grâce au lien de proximité avec le client et parce qu’une grande partie des ventes repose sur les cavistes. Mais un quart des boulangers et bouchers diversifiés ont renoncé au bio entre 2021 et 2022. Si la vente directe tire son épingle du jeu, c’est en lien avec un plus grand chiffre d’affaires des vendeurs déjà établis en 2021 et de l’augmentation du nombre d’exploitants qui pratiquent la vente directe.

Baisse des certifications
La filière française la plus touchée est celle des viandes qui reculent de 13 %, suivie par les produits traiteur, mer et surgelés et les fruits qui baissent respectivement de 8 et 7 %. Seuls les vins voient leur vente progresser de 2 % et les autres boissons alcoolisées stagnent. Le recul du marché bio en 2022 déséquilibre les filières de la production agricole. En prise directe avec une consommation de bio en berne, les entreprises de l’aval des filières (transformateurs, distributeurs…) certifiées pour une activité bio passent de 29 184 à 28 547, soit une baisse inédite de - 2 %.
Ces arrêts de certification concernent de nombreuses boulangeries qui ne proposent désormais plus de pain bio, des boucheries qui renoncent à leur activité bio ou bien encore des magasins généralistes qui vendent essentiellement des produits préemballés ne nécessitant plus de certification.
Hors domicile, le marché des produits bio en restauration tous circuits confondus s’élève à 715 M€ hors taxe, en hausse de 17 %. En 2022, l’ensemble de la restauration reprend une activité normale par rapport à une année 2021 encore marquée par les couvre-feux sur le premier trimestre. En 2022, les denrées bio représentent moins de 2 % des achats des restaurateurs. Le marché bio de la restauration collective (sous contrat et en régie) s’élève à 445 M€ et à 270 M€ en restauration commerciale. 
Les denrées bio représentent 7 % des achats de la restauration collective.

Du bio made in France
Toutefois, on pourra retenir que la majorité des produits consommés en bio sont d’origine France : les œufs, le lait et les produits laitiers, le vin, les viandes fraîches et transformées, le pain frais, les légumes et la majorité des produits traiteurs et surgelés. 83 % du bio consommé en France est produit en France.
En 2022, bien que la barre des 60 000 fermes ait été dépassée pour atteindre 60 483 fermes (+ 3,5 %), un net ralentissement des conversions est observé avec une réduction de 40 % des surfaces en première année de conversion. Les reculs les plus importants touchent les grandes cultures (- 59 %) et la vigne (- 48 %) qui contrairement aux autres filières, avaient maintenu un rythme important de conversion en 2021.
En 2022, les surfaces certifiées bio continuent de progresser de plus de 18 % pour les grandes cultures, les fruits à noyaux et à pépins et la vigne. En ce qui concerne la part des surfaces françaises cultivées en bio, seules quelques productions présentent un taux de plus de 20 % de leurs surfaces conduites en bio : les légumes secs, les plantes à parfum aromatiques et médicinales, la vigne.
Concernant les animaux, les résultats sont plus contrastés entre les filières avicoles d’une part, qui ont opéré de profonds changements d’orientation pilotés par les intégrateurs et une reprise très partielle de la production après l’influenza aviaire, et d’autre part les filières bovine et porcine qui ont subi de plein fouet une baisse de la demande en 2022. Dans la filière porcine, c’est la production de porcs charcutiers bio et les cheptels reproducteurs bio qui affichent une baisse historique de - 7 % par rapport à 2021. Le désengagement des opérateurs sur l’achat des produits en bio n’est pas sans conséquence pour les éleveurs qui peuvent se voir reprendre une partie des aides de conversion à l’AB si le cheptel ne reste pas en bio. Cela peut donc être la double peine pour ceux-ci. À l’inverse, les plus fortes progressions se retrouvent dans les productions de petits ruminants (brebis viande + 11 % et chèvres + 11 %). L’apiculture marque le pas après une année 2021 de fort développement.
’agriculture biologique dans les Pyrénées-Atlantiques est fortement engagée dans une valorisation de ses produits en vente directe. Le département a ainsi connu 46 déconversions en 2022 contre 37 en 2021, et principalement en lien avec des arrêts totaux de l’activité agricole ou des changements de statut juridique des exploitations. Sur le premier semestre 2023, 20 exploitations ont arrêté leur activité bio et 56 nouvelles exploitations se sont engagées en bio. Le nombre d’exploitations bio dans les Pyrénées-Atlantiques est donc de 883 au 9 juin 2023.
Gageons que la part d’exploitations en vente directe n’est pas pour rien dans ce développement de la bio sur le département. Pour conforter cette progression, mangeons bio en achetant de préférence en direct aux producteurs. En 2022, pas moins de 238 producteurs de légumes bio sont référencés sur le département et bien d‘autres produits bio sont disponibles en vente directe. De plus, contrairement aux grandes surfaces, les tarifs ont très peu augmenté. Manger bio et de proximité, le meilleur moyen de contenir la hausse du prix de son panier.

Contact : Ludivine Mignot,  conseillère bio Chambre d’agriculture 64, l.mignot@pa.chambagri.fr