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Quelle dynamique des élevages pastoraux en vallée d’Aspe ?

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Dans le cadre du projet Interreg-Sudoe Open2Preserve, la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques a réalisé un focus sur l’élevage pastoral en Béarn et plus spécifiquement en vallée d’Aspe.

Dans le cadre du projet Interreg-Sudoe Open2Preserve (Littéralement : ouvrir pour conserver) qui vise à développer un modèle de gestion durable des espaces ouverts de montagne fondé sur l’usage complémentaire du pâturage et de l’écobuage, un des objectifs était l’étude de stratégies de valorisation des produits issus des élevages mettant en valeur ces zones. Pour ce faire, la chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques a réalisé un focus sur l’élevage pastoral en Béarn et plus spécifiquement en vallée d’Aspe.

Des ressources pastorales cruciales
Un rapide coup d’oeil historique nous montre, en un siècle, une simplification notable du système agropastoral. En effet, dans les années 1900, la logique des poly-éleveurs (bovins lait et ovins lait) de la vallée d’Aspe était de suivre la végétation au fil des saisons. Transhumance estivale longue, transhumance hivernale dans les plaines du département et au-delà, et utilisation des zones intermédiaires (espaces privés ou communaux entre les sièges d’exploitation et les estives) au printemps et en automne. Les bergers n’étaient que très peu présents sur leur siège d’exploitation tout au long de l’année.
Aujourd’hui, après un exode rural marqué et une évolution des systèmes de production (mécanisation, hausse de la productivité, système d’alimentation…), le système agropastoral s’est simplifié et recentré autour du siège d’exploitation.
Malgré tout, les espaces pastoraux restent indispensables et représentent 25 à 45 % des ressources fourragères des éleveurs de la vallée d’Aspe selon les différents systèmes d’élevage. L’ensemble des systèmes utilisent la transhumance estivale, sur des durées plus ou moins longues, et, pour les élevages laitiers, parfois avec des animaux taris. En revanche, tous les systèmes n’utilisent plus forcément les zones intermédiaires. Certains privilégient leur usage par des vaches allaitantes ou des animaux improductifs, mais d’autres, à condition d’avoir du bâti dans ces zones pour pratiquer la traite, continuent à les valoriser avec des animaux en lactation. Les ressources fourragères de ces zones peuvent représenter jusqu’à 30 % de la consommation fourragère des fermes pour des systèmes bovins allaitants spécialisés.

Des valorisations contrastées
L’utilisation de ces espaces témoigne, certes, d’une logique économique et territoriale, mais aussi surtout d’une volonté des éleveurs à entretenir et valoriser la montagne. Mais elle représente aussi de fortes contraintes pour les éleveurs en termes de main-d’oeuvre, de pénibilité, ou encore de productivité nécessairement plus faible. Or, ces contraintes ne sont, aujourd’hui, pas forcément compensées par la valorisation des produits.
C’est en premier lieu le cas des systèmes pastoraux de bovins allaitants spécialisés, dont la valeur ajoutée (ensemble des produits – ensemble des charges) est négative. Leur produit n’est, en effet, pas différencié par rapport à un produit standard.
Pour les systèmes laitiers, la valeur ajoutée est extrêmement variable — de 12 000 €/actif à 28 000 €/actif — et dépendante, avant tout, de la valorisation du lait, les charges variant peu dans les enquêtes réalisées.
Ainsi, la valorisation du litre de lait de brebis pour des systèmes fromagers peut aller de 1,50 €/l à plus de 3 €/l. Cette valorisation dépend, avant tout, des circuits de commercialisation privilégiés et/ou possibles : la valorisation d’un kilo de fromage de brebis peut aller de 11 € en moyenne chez un grossiste à 17 € en moyenne en vente directe. En vente directe, le prix de vente au kilo entre producteurs peut également varier de 14 € à 22 €.
Il faut aussi noter qu’en vallée d’Aspe, une grande proportion des éleveurs fabrique du fromage mixte vache/brebis. Alors que ce produit est très recherché par les fromagers, sa valorisation reste faible compte tenu de la mobilisation de main-d’oeuvre nécessaire. Le fromage d’estive représente, lui, un plus considérable : il peut représenter de 14 % à 34 % du produit brut d’une ferme.

Des revenus modestes
Si les valeurs ajoutées créées sur les fermes sont très variables voire parfois négatives, les revenus sont, eux, plus homogènes du fait d’un certain lissage par les aides. Ces revenus (sans annuités), s’échelonnent de 20 000 €/actif à 34 000 €/actif après prélèvements MSA. Selon les systèmes, les aides représentent l’équivalent de 45 % du revenu (sans annuités) pour les éleveurs laitiers valorisant le mieux leur fromage, à 100 % du revenu pour des systèmes en bovins viande.
Cette étude montre que la valorisation par les éleveurs des espaces ouverts de montagne reste complexe et incertaine à l’avenir. Si les fromages produits en estives bénéficient d’une valorisation économique salutaire mais parfois insuffisante, aucune distinction ne s’applique sur les produits tirés du pâturage en zones intermédiaires, que ce soit pour la viande ou le lait.
Dans un contexte de baisse de main-d’oeuvre, l’utilisation de ces zones est aujourd’hui en équilibre précaire. Ainsi, sans soutiens supplémentaires, il est probable que ces zones poursuivent leur fermeture, l’écobuage ne pouvant suffire pour entretenir ces zones. Les enjeux autour de ces zones dépassent pourtant largement le cadre agricole : refuges de biodiversité, elles sont aussi des composantes essentielles de nos paysages et des zones de rupture de combustible permettant de protéger les quartiers d’altitude voire les villages des risques d’incendie, en vallée d’Aspe et sur tout le département.

Contact :
Jean Beudou, conseiller filière ovine - Recherche, développement, innovation
Chambre d’agriculture des Pyrénées-Atlantiques
Tél. : 06 74 75 39 97
@ : j.beudou@pa.chambagri.fr