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Brebis : produire et intégrer du soja toasté dans la ration

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Le soja toasté a trouvé toute sa place dans le système d’alimentation du troupeau.

Toaster du soja consiste à le chauffer (passage sous air pulsé à 280 °C quelques secondes) pour en augmenter la teneur en protéines assimilables par les ruminants. Le toastage du soja permet de réduire les facteurs antinutritionnels et de l’introduire de façon plus importante dans la ration des brebis.
Les principaux gains attendus de la mise en œuvre d’une telle pratique sur l’exploitation relèvent essentiellement d’une meilleure autonomie protéique de l’élevage. Le niveau de lactation (et le taux de MSU) et l’état des brebis s’en trouvent améliorés. La diversification de l’assolement permet également une sécurisation de l’accès à l’éco-régime de niveau 2 de la PAC en plus des vertus reconnues de l’introduction de soja dans une rotation culturale. Enfin, le volet économique est également impacté par la production d’un aliment au tarif très concurrentiel vis-à-vis des achats extérieurs.
Cette pratique constitue un levier adapté pour les élevages cherchant à améliorer leur autonomie protéique, à diversifier leur assolement. Elle s’adresse à des exploitations disposant d’une bonne autonomie fourragère. Enfin, cette pratique intéressera particulièrement les éleveurs soucieux de disposer d’une très bonne traçabilité des matières premières.

Les facteurs de réussite
Le soja ne reste pas plus de 2 ans sur une même parcelle pour des raisons sanitaires. Un maïs ou une prairie prennent la suite dans la rotation. Un apport de fumier (25 t) constitue le seul amendement apporté (pas de fertilisation minérale). Le rendement moyen sans irrigation est de 35 quintaux par ha. Suite à la récolte, un dérobé est implanté dès le mois d’octobre de façon à disposer de pacage hivernal pour les brebis dès la mi-novembre. Le soja toasté est introduit dans la ration des brebis laitières dès la fin de gestation à raison de 50 g/brebis/jour de façon progressive en respectant une période de transition alimentaire. En lactation, le niveau de distribution passe de 150 g/brebis/jour à un maximum de 250 g/brebis/jour. Les achats de tourteau de soja à l’extérieur ont été supprimés. Concernant l’itinéraire technique, il convient de retenir :

  • Récolte… et trieuse si salissement parcelle.
  • Stockage en remorque ou cellule selon les délais du passage du toasteur.
  • Toastage en CUMA (2 t de soja /heure) et refroidissement/ventilation 6 à 8 heures à l’aide de cheminées d’aération installées dans la remorque pour aider à la redescente en température du produit.
  • Stockage en silo.
  • Broyage et distribution au fur et à mesure des besoins du cheptel.

Le soja en post-récolte sera à stocker en remorque : attention au taux d’humidité à la récolte qui peut être un facteur de détérioration des graines de soja. 
Deux remorques sont nécessaires lors du chantier de toastage : une contenant le soja à traiter, une pour récupérer le soja toasté. Afin de réduire la manutention, il convient dans la mesure du possible de disposer d’une cellule de stockage du soja toasté. Dans le cas contraire, le stockage se fera en big bag de 600 kg ou une tonne. Prévoir un broyeur à utiliser juste avant distribution aux animaux.

Combien ça coûte ?
160 €/tonne : c’est le prix de revient du soja toasté (charges opérationnelles + frais semis, récolte et toastage inclus). La culture du soja est peu gourmande en intrants. Pour l’exploitation, le principal poste de charge concerne les semences pour un montant de 222 €/ha. Grâce à sa capacité à fixer l’azote de l’air, le soja n’a pas besoin d’apport minéral. Le poste des traitements se monte quant à lui à 70 € / ha. Le coût du toastage seul se chiffre à 341 € pour 16,5 tonnes de soja traitées : soit 20 € / tonne (sur la base de 3,5 tonnes de soja récoltées par ha). Le semis, sous-traité à une entreprise, revient à 71 € / ha alors que la récolte se chiffre à 128 € /ha via la CUMA.

Les avantages

  • Itinéraire cultural assez simple.
  • Le cycle cultural court permet une récolte précoce avant une implantation de dérobée (avoine/ vesce / trèfle) pacagée sur la période hivernale.
  • Autonomie alimentaire et protéique.
  • Effet marqué sur le taux de MSU du lait avec une hausse de 10 points de la matière grasse.

Les inconvénients

  • Désherbage à maîtriser : c’est un facteur de limitation du travail post-récolte. Les graines d’adventices seront à écarter via une trieuse.
  • Manutention : le toastage n’est pas réalisé directement la récolte effectuée, une phase de stockage transitoire est indispensable (en remorque le plus souvent) avant reprise pour l’opération de traitement et restockage en cellule.

La démarche mise en place par les associés du GAEC Etcheberria a été initiée lors de la réforme de la PAC 2015. Les surfaces exploitées en culture à l’époque demandaient l’implantation d’une troisième culture pour satisfaire aux critères du verdissement. La mise en place de la culture de soja, outre les aspects bénéfiques qu’elle pouvait apporter sur le plan agronomique dans le cadre de la rotation des cultures pouvait également présenter une opportunité sur le plan de l’autonomie protéique. Le toastage du soja permet de répondre à cette deuxième préoccupation légitime pour tout éleveur qui cherche à valoriser ses surfaces au travers d’une augmentation de l‘autonomie alimentaire.

Le témoignage de Pierre Couillet

Si la réflexion a été initiée en 2015, le projet n’a pu aboutir que dans le cadre d’une démarche collective plus globale permise par l’intermédiaire de la CUMA 640. Il était indispensable de pouvoir disposer de suffisamment de surface et de volumes à traiter pour envisager la venue d’un toasteur dans le secteur.
Le déclic : réforme de la PAC 2015
« L’obligation d’implanter une troisième culture suite à la réforme de la PAC en 2015 nous a amenés à nous poser la question de la valorisation de celle-ci par nos bêtes. Un premier test a été sur le troupeau de vaches Blondes d’Aquitaine. Ce n’est que l’année suivante que nous sommes passés sur l’atelier ovin lait. »
Les effets positifs induits : amélioration de l’état des brebis
« Les brebis nous apparaissent en meilleur état corporel depuis la mise en place de la distribution du soja toasté dans leur régime alimentaire. C’est un élément indispensable afin de sécuriser le niveau de production laitier du cheptel. »
Réduction des apports en maïs grain
« Depuis l’introduction du soja toasté dans nos rations, nous avons réduit les apports en maïs grain de 50 à 100 grammes par brebis et par jour en moyenne. Nous n’avions pas identifié ou imaginé une telle richesse énergétique du produit : cela correspond à 5 tonnes par an de maïs grain économisées pour notre système. »
Mon conseil : ne pas manquer le désherbage
« Bien réussir le désherbage de la culture permet d’obtenir une récolte propre avec très peu de graines d’adventices. Ceci réduira d’autant le recours à la trieuse d’une part mais diminuera également le taux d’humidité de la récolte et réduit très fortement les risques de chauffe des graines durant la période de stockage avant toastage. En conséquence, je n’hésite pas à effectuer un rattrapage même si la parcelle peut paraître peu sale. »
Si c’était à refaire ? Pas de regret : je le referais plus tôt
« Après 7 années de mises en pratique, le soja toasté a trouvé sa place dans le système d’alimentation du troupeau. De valeur alimentaire élevée, c’est un produit intéressant pour la production laitière (hausse des taux). Nos sommes arrivés à 77 % d’autonomie protéique sur l’atelier ovin lait. Outre le fait de produire son propre soja tracé, l’avantage est encore supérieur avec la conjoncture actuelle de prix des aliments très élevés. »

Contact : Bixente Doyhenard, Chef de projet installation/transmission à la Chambre d’agriculture 64