Vous êtes ici : Accueil > Actualités > Canicule estivale : adapter sa conduite d'élevage ?

Canicule estivale : adapter sa conduite d'élevage ?

Accéder aux flux rss de notre siteImprimer la page

L'’été est habituellement la période la plus critique, tant pour la disponibilité en herbe à pâturer que pour le confort du bétail. En effet, les fortes chaleurs éventuelles impactent le bien-être, la santé et les performances des animaux, ainsi que les prairies. Petit tour d’horizon des adaptations à envisager afin d’en limiter les effets délétères…

 

Effets sur le bétail
L
es ruminants, en particulier s’ils sont laitiers, sont particulièrement sensibles aux fortes chaleurs. La zone de confort thermique, pour la plupart, ne dépasse en effet pas les 25°C. Ce seuil est cependant abaissé lorsque, simultanément, l’air est chargé en humidité.

Avec l’élévation des températures (et de l’humidité relative), peuvent alors s’observer plusieurs effets, sur un gradient allant d’un inconfort à un stress sévère : changements de comportement (piétinement, halètement, moindre ingestion), voire troubles métaboliques : moindre expression des chaleurs (avec perturbation de l’ovulation), baisse de l’immunité … Avortement ou acidose voient aussi accroître leur risque d’occurrence.
Le bien-être, la santé et les performances des animaux sont donc impactés.

Effets sur la végétationLes fortes chaleurs, d’autant plus si elles se cumulent à un manque de précipitations, impactent aussi la végétation, en stoppant la pousse.
Il importe dès lors, pour ne pas risquer d’aggraver (et de prolonger au-delà du retour à des conditions climatiques plus favorables) une situation de manque d’herbe, de veiller à ne pas râper les prairies. Le libre accès au maximum de prés simultanément ou/et le retour trop rapide sur les mêmes parcelles ont le même effet pernicieux de sur-pâturage sur la végétation, compromettant les repousses à venir.

Pâturer en été ?
Quelle que soit la saison, préserver l’herbe lors de la pâture oblige à ajuster l’utilisation de l’herbe à son niveau de pousse : les hauteurs moyennes de végétation à l’entrée (15 cm -ou 3 feuilles-) et de sortie (5 cm résiduels), ainsi que la durée du séjour (4 jours maximum) sur une même parcelle sont constantes ; seul le délai avant retour sur un même pré est saisonnier.
En été, s’adapter au ralentissement de la pousse passe par différents moyens, éventuellement cumulables :

  • Division des grandes parcelles : les surfaces ainsi réduites sont mieux broutées, et les parcs supplémentaires ainsi créés permettent d’allonger les délais avant retour.
  • Augmentation du nombre de parcelles à pâturer, par retour de parcelles fauchées initialement.
  • Augmentation de la ration distribuée.
  • Utilisation de prairies poussant l’été : soit riches en légumineuses, chicorée, plantain lancéolé, ou/et des dérobées de graminées estivales (sorghos multicoupes…).

Du côté du bétail, diminuer le stress thermique (et maintenir, un tant soit peu, un niveau de productivité) va demander de :

  • Maintenir le bétail sur des prés avec abris naturels (ou les rentrer en bâtiment la journée).
  • Garantir l’abreuvement (par fortes chaleurs, les animaux se déplacent moins) : points d’eau, idéalement tous les 200 m et en dehors des zones ombragées, avec débit suffisant.
  • Apporter la ration aux heures fraîches, avec double passage (tôt le matin et le soir).
  • Concentrer la ration, pour compenser la baisse d’ingestion.
  • Renforcer les apports minéraux, en particulier de bicarbonate de sodium, pour pondérer les pertes et le manque de salivation dû à une moindre rumination.

Le point de vigilance estival avec du stock ensilé reste l’échauffement du front d’attaque ; l’avancée moyenne recommandée passe, à cette période, à 20 cm / jour ; cela demande une élaboration initiale soignée du silo (largeur, tassement, éventuel emploi de conservateur, ...) et une distribution suffisante.

Quand/si la végétation stagne à 3-4 cm (et idéalement en ces conditions très limitantes, même un peu plus haut), il convient de maintenir et d’affourrager le bétail sur une seule parcelle « sacrifiée » (avec ombrage), ou de retourner en bâtiment.

Tous les animaux, qu’ils soient dominants ou dominés, doivent pouvoir se désaltérer dans un laps de temps réduit. Lorsque le groupe repart, toutes les bêtes repartent, même si certaines n’ont pas pu boire suffisamment. Le placement à l’ombre (et dans un coin) d’un point d’eau en limite souvent l’accès aux seuls animaux dominants du troupeau ; de plus, le débit doit pouvoir assurer, en 10 minutes, un tiers (voire la moitié en pâturage continu) des besoins du lot. La place accessible doit quant à elle permettre l’abreuvement simultané de 15% (plutôt 25% en pâturage continu) des bêtes présentes (source Chambres d’Agriculture Centre et Val de Loire).

Quid à court et moyen termes ?
Le contexte actuel de réchauffement climatique nous fera vivre de plus en plus fréquemment et intensément des périodes de canicule.

Des adaptations supplémentaires sont à envisager, en complément des mesures plus immédiates ci-dessus, comme :

  • Améliorer la ventilation naturelle des bâtiments.
  • Disposer de systèmes de ventilation/brumisation en bâtiment.
  • Renforcer les points d’eau (en étant toujours vigilant à assurer un débit suffisant et la qualité de l’eau).
  • Aménager des zones ombragées ne coupant pas la circulation de l’air.
  • Envisager des (re)plantations de haies ou/et de l’agroforesterie. Un couvert arboré assure une baisse de la température ambiante de 2 °C en moyenne, voire jusqu’à - 6 °C en période caniculaire, par rapport à une zone non abritée (source Institut de l’Élevage, programmes Arbele et Parasol).

Marie Claude MAREAUX
CHAMBRE D'AGRICULTURE 64  
05 59 80 69 92
mc.mareaux@pa.chambagri.fr